La sensation de la faim m'avait quitté. Ou plutôt, j'étais habitée par une soif immense.
Je cherchai la transparence de mes doigts dans le vent.
Mon regard ne trouvait plus où se poser, la surface des choses paraissait être une mer immense où chaque élément semblait être une goutte parmi d'autres gouttes.
Toutes semblables, toutes différentes.
Une sorte de puzzle où je ne me retrouvai pas, où je tendais à disparaître.
Hors de moi même, au sens propre.
Comme au delà de ce qui est moi.
Le sang, les os, la chair.
Le battement de cœur.
Et puis un soir, le battement qui s'accélère dans la poitrine, plus fort.
Allongée, en partance pour le sommeil.
En glissade, cette résonance en dedans, doublant la mienne.
Un frisson, une nappe de sons, un grésillement d'atomes.
Un courant traversant/traversé.
Une conscience du vide, de l'espace.
Un fourmillement.
Je suis partie.
J'ai longé les plages sous les grands filaos.
Il y avait cette salle immense, avec à l'intérieur ce qui semblait être des tableaux que j'avais peint.
Quelqu'un, une femme, était là, et les recouvrait à grandes traces longues et étirées d'une couleur pourpre.
Dans toute la largeur, depuis le sol jusqu'au sommet.
Je suis partie, j'ai avancé.
D'abord j'ai marché, puis j'ai senti le courant m'emporter.
Fluide, de plus en plus légère, j'ai arpenté jusqu'à effleurer le flanc rocailleux de la montagne immense, dans une averse de lumière.
Proche du sommet, évanescente, j'ai eu un dernier regard vers le bas, un sourire.
Il était là, juste en dessous de moi, le bras tendu par l'effort.
Est ce qu'il m'a hissé, est ce qu'il me tendait la main...
Je me suis allongée et j'ai respiré.
Le pouls de la terre depuis le sommet.
Fondue, confondue dans la pierre, dans la lumière qui éclaboussait tout.
Lorsque je me suis relevée, des monts verdoyants éclatés tout autour de moi.
C'est là que je me suis éveillée.
J'étais lui au sommet du monde.
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