Une feuille après l'autre, deux bottes défaites doucement.
Les nervures de Mafane entre les doigts, je revois les zébus prêts de l'eau.
Le sourire de ma grand mère qui s'est effacé avec le temps.
Tout ce qui s'efface, de peu de poids dans le courant de la vie.
L'anesthésie savoureuse dans la bouche.
Les jours s'égrainent jusqu'au 20 décembre.
Je pense davantage à la puissance du mot Liberté, au prix du sucre, qu'aux dérives matérialistes de Noël.
Au riz.
Au riz réservé, celui qui a sauvé bien des ventres de la faim.
Je sens tout le poids de l'eau qui manque.
Chaque muscle usé dans l'effort pour grimper plus haut.
Course folle.
Poing de côté.
Ascension de poussière rouge.
La chaleur, écrasante la chaleur.
Mon regard qui porte loin. Au sommet.
Les yeux graines Kadoc.
Je voudrais marcher longtemps. Ne jamais m'essouffler. Ivre de l'odeur résineuse qui me transporte rien qu'en idée.
Je sens mon coeur battre trop fort assise, là.
Une masse grise descend depuis ce matin.
L'air est différent, la nuit a été plus douce.
La faim est loin. Mon corps cherche la pluie.
Je souries dans la demi pénombre de la cuisine, en pensant à la lenteur de l'anesthésie.
Quelques poignées des feuilles fraîchement triées, jetées sur la planche de bambou, sous la lame aiguisée.
Le fond de miso qu'il reste dans le bocal. Quelques lamelles de champignons. Des algues.
Les nuages qui s'amassent plus sombres.
Les gouttes de siave. La poudre de cresson.
Le gazon du jardin qu'il faudrait tondre peut être.
Le jardin qui redevient un rien sauvage.
Le temps d'éteindre le feu et de m’asseoir.
A peine le bol posé devant moi. Tout juste un souffle d'air sur la varangue.
Le murmure de la pluie s'étire entre les branches.
Un tête à tête où je laisse tout s'en aller.
Les effluves de terre humide remonte doucement.
Un oiseau fait sa toilette sur une branche.
C'est là, tout juste là, que j'aime être vivante.
Je disparais dans la chute de chaque goutte qui vient nourrir le sol.
Enfant, j'aimai nager dans l'océan devenu gris.
En grandissant, je n'ai pas su apprendre à me retenir.
J'aime donner ma peau à la fraîcheur de l'eau du ciel.
Je mets mes mains dans les rideaux qui dévalent du toit.
C'est là que je suis vivante.
Ce qu'il m'en coûte de revenir aux mots.
En début d’après midi, entre l’anesthésie douce qui s'efface dans mon palais et l'amertume fleurie du thé au jasmin brûlant.
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